Eunice Kathleen Waymon fut très attirée par la musique classique dès sa plus tendre enfance dans les années 30 en Caroline du Nord et "faillit s'évanouir tellement c'était beau" lorsqu'elle découvrit la musique de Jean-Sébastien Bach.
Elle souhaitait devenir pianiste concertiste et sa professeure de piano estimant n'avoir plus rien à lui apprendre parvint à réunir des fonds pour lui permettre d'effectuer un stage à la prestigieuse Julliard School de New York afin de préparer le concours d'entrée à l'encore plus prestigieux Institut Curtis de Musique de Philadelphie. Malgré une audition qui lui sembla réussie elle ne fit pas partie des 3 reçus (sur 72 candidats) en 1950 et estima toute sa vie que c'était parce qu'elle était noire et femme...
Elle continua donc à prendre des leçons de piano à titre privé auprès des plus prestigieux professeurs (dont Vladimir Sokoloff qui enseignait à l'Institut Curtis...) et pour se les payer commença à jouer et chanter dans les bars sous le pseudonyme de Nina Simone...

En 1971 Nina Simone est devenue une star, d'aucuns la considèrent même comme une diva capricieuse et ingérable, fâchée avec tout le monde et le fisc américain en particulier... Elle a quitté les USA pour la Barbade et s'installera ensuite au Libéria, en Suisse, aux Pays-Bas puis en France pour ses vingt dernières années.
Militante des droits civiques, elle soutient la révolution par la violence avec Malcolm X et contre Martin Luther King auquel elle a cependant dédié le concert qu'elle a donné trois jours après son assassinat en 1968... Elle est à l'apogée de sa carrière mais ses titres figurent rarement en haut des classements et elle est régulièrement censurée par les radios qui la jugent (à raison !) politiquement provocatrice... Ses concerts font cependant salle comble et sont encensés par la critique.
Le 18 novembre 1971, Nina Simone joue à Fort Dix, l'une des plus importantes bases de l'armée américaine située dans le New Jersey. Elle est certes contre la guerre du Vietnam mais beaucoup des jeunes appelés sont noirs... et ils la réclament comme vous allez l'entendre au début du medley "My Sweet Lord / Today Is a Killer" enregistré ce jour là et qui ouvre l'album "Emergency Ward !" publié en 1972.

Nina Simone, accompagnée du Bethany Baptist Church Junior Choir of South Jamaica de New York y mélange la chanson de George Harrison "My Sweet Lord" et un poème de David Nelson intitulé "Today Is a Killer" qu'elle a mis en musique. Elle alterne les passages enjoués et pleins de vie avec des séquences lentes et sombres sans pour autant que l'ensemble perde de son incroyable puissance à un quelconque moment... sans doute un des ses plus beaux enregistrements et surtout une partouze d'anthologie ! ;-)

J'ai découvert cet incroyable morceau de bravoure lors d'un embouteillage sur le périphérique parisien en fin de journée et son écoute a illuminé ce moment qui sans ça aurait été cauchemardesque... Il était diffusé sur FIP, ma radio préférée et sans doute une des seules radios françaises qui peut se permettre de diffuser un morceau de 18'30" (!) à une heure de grande écoute car sa grille n'est pas calibrée par et pour les passages des spots publicitaires puisqu'il n'y a pas de pub sur FIP :-D

Les programmes de FIP comme ceux de toutes les antennes de Radio France sont perturbés depuis le 25 novembre en raison d’une grève contre un plan d’économies prévoyant la suppression de près de 300 postes (sur environ 4.800).
Les syndicats jugent que le plan de départs volontaires "est dangereux, pour chacun des salariés et pour la pérennité de Radio France". Ils dénoncent un plan qui découle de la baisse des crédits de l’audiovisuel public imposée par le gouvernement, qui va accroître la charge de travail des salariés, le recours à des statuts précaires, dégrader la production – volume, qualité et diversité des contenus – véritable valeur ajoutée de Radio France et mettre en péril des savoir-faire (production radio ou spectacle vivant). La direction de Radio France argue que "le projet de transformation de Radio France est nécessaire pour construire son avenir et celui des salariés" et qu’elle "souhaite le mener dans le dialogue". Elle rappelle que les départs seront volontaires, avec notamment des aménagements de départs à la retraite...
Sempiternelle litanie de la marchandisation du monde... :-(

Dans un monde où Eunice Kathleen Waymon ne serait pas devenue Nina Simone mais la "première concertiste classique noire en Amérique" qu'elle rêvait d'être et où FIP n'existerait pas, il me manquerait quelque chose sans que je le sache... Merci donc à Nina Simone (je n'irais pas jusqu'à remercier le jury d'entrée à l'Institut Curtis de la session 1950 !) et merci aux talentueuses équipes de FIP :-D

Spéciale dédicace à Pascale A, une grande amie et fidèle partouzeuse, une femme de la même trempe que Nina Simone et dont ce sera l'anniversaire demain... D'avance Bonne Partouze Joyeux Anniversaire Pascale ! :-D

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Nina_Simone_-_Emergency_Ward