Mardi soir, en rentrant de ma séance mensuelle de shiatsu, j'achevais la lecture du numéro de juin du Monde Diplomatique dans le métro(1) par la section Livres du Mois et quelle n'a pas été ma surprise de tomber sur la recension suivante écrite par Jean-Louis Mingalon !
« PLAYLIST. Musique et sexualité - Esteban Buch
Éditions MF, Paris, 2022, 312 pages, 20 euros.
On aurait pu s’en douter mais pas à ce point. Amorcée dans les années 1990, grâce notamment à l’émergence de la musicologie féministe, l’exploration de la relation entre musique et sexualité prend aujourd’hui une nouvelle dimension avec le travail de haute volée d’Esteban Buch, Argentin installé en France et directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Dans une succession de seize essais illustrés, à lire séparément et dans n’importe quel ordre, il analyse, parfois après enquête et non sans humour, comment la musique intervient dans « notre économie des plaisirs » selon son expression, et inversement comment le sexe surgit dans les pratiques musicales, quel que soit le genre concerné (savant, populaire, vocal et même instrumental). C’est dire que le territoire arpenté est immense et convoque des œuvres sensiblement diverses, de Wolfgang Amadeus Mozart (Don Giovanni) ou Richard Wagner (Tristan et Isolde) à Dmitri Chostakovitch (Lady Macbeth de Mzensk) ou Kurt Weill (L’Opéra de quat’sous), sans oublier Serge Gainsbourg (Je t’aime… moi non plus) ou Madonna (Erotica). La lecture est parfois ardue mais l’agrément de la découverte est souvent à la hauteur de l’effort. »
La présentation sur le site de la maison d'édition est encore plus appétissante, pour ne pas dire carrément émoustillante :
« L’ouvrage Playlist. Musique sexualité est constitué de seize essais autonomes, qui explorent tour à tour la musique dans les pratiques sexuelles, et le sexe dans les pratiques musicales. Il se déploie d’une thématique vers l’autre, comme un texte de sociologie de la musique qui virerait insensiblement au texte de musicologie. Quel est aujourd’hui le rôle de la musique dans la vie sexuelle des personnes, la réelle comme la fantasmée ? Quelles sont les représentations de la sexualité dans les œuvres musicales, celles du répertoire classique comme celles des genres populaires ? Quelle a été, de l’Antiquité à nos jours, la trajectoire historique de ces imbrications ? Comment cette histoire dialogue-t-elle, dans la période contemporaine, avec le devenir marchand de la musique, et avec sa numérisation ? Comment la musique s’insère-t-elle dans l’histoire sonore de la sexualité, ce territoire méconnu des sound studies ? Quelles conséquences cette enquête peut-elle avoir pour repenser les pouvoirs de la musique ?
Telles sont les questions que ce livre se propose d’explorer. Chaque chapitre aborde ce vaste domaine à partir d’une entrée singulière, comme une série de variations sur un thème musical, ou une playlist thématique. Ce choix formel fait écho à la diversité des œuvres concernées : Don Giovanni de Mozart, Tristan et Isolde de Wagner, Lady Macbeth de Chostakovitch sont ainsi revisités, entre autres classiques, tout comme Je t’aime moi non plus de Gainsbourg, L’importante è finire de Mina, ou Erotica de Madonna, entre autres tubes. Plus récemment, la diffusion sur internet d’une music for sex et les dispositifs de recommandation des plateformes de streaming incitent à revisiter la critique adornienne de l’industrie culturelle, les idées de Guy Debord sur les femmes dans la société du spectacle, ou encore l’enquête sur la sexualité de Pasolini dans son film Comizi d’amore.
Le livre se veut ainsi à la fois une enquête empirique et une proposition théorique, qui discute avec la musicologie féministe et les queer studies, avec les sciences cognitives de l’écoute et du plaisir, avec la sociologie de la culture et l’histoire culturelle. En envisageant la musique comme un dispositif technique aux usages diversifiés, de la présence anthropomorphe à la « musique d’ameublement », il esquisse une écologie sonore capable de rendre compte à la fois des logiques du plaisir et de celles de la domination, à commencer par la domination des hommes sur les femmes. Si la musique n’a cessé, au cours de l’histoire, d’énoncer et de faire sentir par les sons l’amour et ses attachements, le désir et ses imaginaires, l’ambition ultime de Playlist est de contribuer à une conception renouvelée des formes temporelles de l’expérience humaine. »
Quant au sommaire, mes amis, c'est un véritable poème lascif !
- Plages
- Sex playlists
- Enquête sur la sexualité, ossia Il Don Giovanni
- Monique et Rémy et les autres
- Machines du meilleur des mondes
- Googler Music for Sex
- Les amants de Hollywood
- Triangle à Pompéi
- Dada et Isolde
- Tangos savants
- Pornophonie d’État
- Aimer la musique
- Le chant des filles-marchandises
- Je t’aime et cætera
- Extases neuronales
- Remède à la mélancolie
En somme, cet ouvrage constitue le cadeau idéal à offrir (se faire offrir et même s'offrir) à l'occasion du quatrième anniversaire de La Partouze Musicale demain vendredi 14 juillet !
Je vous suggère de le lire en écoutant l’œuvre du folk singer suédois José González(2), par exemple son dernier album (et quatrième album studio) "Local Valley" (2021). Un beau disque qui s'ouvre par une superbe chanson en espagnol, "El Invento", la toute première chanson de José González en espagnol(3), la langue maternelle de ses parents argentins.
Il a confié que cette chanson lui a été inspirée par sa fille : « De temps en temps, j’essaie d’écrire des paroles en espagnol – cette fois, j’ai réussi ! Je suppose que le fait de parler à Laura en espagnol tous les jours m’a aidé. J’ai commencé à écrire "El Invento" vers 2017. Elle avait alors sept mois. La chanson traite des questions – qui nous sommes, où nous allons et pourquoi ? Qui pouvons-nous remercier pour notre existence ? Historiquement, la plupart des traditions ont inventé des réponses à ces questions. D’où le nom de la chanson : "El Invento" (l'invention(4)). »
Spéciale dédicace à Giovanni dont c'était l'anniversaire ce jour... Bonne Partouze Joyeux Anniversaire l'ami !
J'achève ce billet alors que les tirs de mortiers d'artifice commencent à résonner dans le lointain...
Bonne Partouze Nationale !
(1) Eh ouais c'est mon côté "bobo parisien" (pléonasme) totalement assumé : j'aime me faire tripoter par des mains expertes, je prends les transports en commun, suis éco-responsable et islamo-gauchiste, par conséquent je lis le Diplo
(2) Eh ouais on peut être suédois et s'appeler José González, tout comme on peut être français et s'appeler Zinedine Zidane ou Omar Sy, si si !
(3) Il chantait jusque là exclusivement en anglais et sur ce dernier album il interprète même une chanson en suédois écrite et composée par sa compatriote Laleh Pourkarim (oui, c'est un nom perse)
(4) Vous aurez compris que José González se dit athée, il est également flexitarien et adepte de l'altruisme efficace, en somme complètement woke !
Ecouter avec Deezer Ecouter avec Spotify Vidéo-clip
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